RÉSEAUX

Maillage régional

Contrairement à nombre d’idées reçues, il n’existe pas en Bourgogne – comme dans la plupart des autres régions administratives d’ailleurs – UNE langue régionale mais DES langues régionales, cinq plus exactement. Ici comme ailleurs, le fait linguistique est pluriel, souvent complexe et riche d’une diversité qui transcende tous les clivages, qu’ils soient politiques, idéologiques ou culturels.

Si le bourguignon-morvandiau s’étend sur la plus grande partie de la
Bourgogne, notamment sur un espace que l’on qualifiera de « central », il déborde néanmoins au-delà des limites de la région Bourgogne,
jusqu’au Langrois (en Haute-Marne, région Champagne-Ardennes) et au nord de la Franche-Comté.

Le nord de la Bourgogne appartient davantage au champenois, et a donc été couvert par l’Atlas linguistique de Champagne. L’ouest en
revanche relève des parlers du Centre, tandis que le sud-ouest relève
du domaine franco-provençal. Ce caractère prismatique des parlers
bourguignons traduit la situation de carrefour qu’est la Bourgogne.
L’espace de transition entre langues d’oïl et parler franco-provençal est d’ailleurs la seule «frontière linguistique» qui traverse la Bourgogne.

C’est là un fait linguistique majeur et original. La Bresse, au sud et à l’est de Louhans, est purement franco-provençale. L’influence de cette langue se fait également sentir dans le Mâconnais, le Brionnais et le Charolais.

Répartition des aires linguistiques en Bourgogne

Bourguignon-Morvandiau

Nivernais,

Berrichon

et Bourbonnais

Franco-provençal

Champenois

Maison du Patrimoine Oral de Bourgogne

Diversité, centralité et unité linguistique.

Le bourguignon-morvandiau s’étend sur la majorité du territoire régional, notamment sur un large espace central. Cette centralité permet de définir et d’articuler les autres langues régionales, soit par proximité (pour les autres langues d’oïl) soit par distanciation (le francoprovençal). D’une certaine manière, c’est autour de cette langue régionale centrale que se crée l’unité linguistique de la région Bourgogne.

Défense et Promotion des langues d'oïl

Toutes les langues, quelles qu’elles soient, offrent un témoignage unique du génie culturel des peuples. La mort d’une langue représente donc une perte pour l’humanité tout entière. Sur les six mille langues répertoriées dans le monde, beaucoup sont menacées de disparition. (...) Une langue qui meurt entraîne la perte irrémédiable de connaissances uniques sur le plan culturel, historique et environnemental. Chaque langue témoigne à sa façon de l’expérience humaine. C’est pourquoi la maîtrise des langues, quelles qu’elles soient, peut apporter une réponse aux questions fondamentales de demain. À chaque fois qu’une langue meurt, nous perdons une partie des éléments qui nous aident à comprendre la structure et la fonction des langues, la préhistoire de l’humanité et à maintenir la grande variété d’écosystèmes dans le monde.

Voici l’un des multiples enseignements produit par l’attention du chercheur à la langue de l’autre. Hugh Brody, anthropologue américain travaillant avec les peuples indiens du Canada, conclut son étude sur les langues perdues de ceux qu’il appelle « Les exilés de l’Eden » :

Quand on voyage à travers les vastes forêts du Nord-Ouest Pacifique, … on peut entendre un silence particulier …. Ce silence témoigne de la perte des mots qui confèrent à cet endroit, comme à beaucoup d’autres, son expression la plus pleine et la plus riche. La perte des noms que les peuples ont donnés à leurs collines, leurs fleuves, leurs baies… la perte de leur façon d’évoquer les origines, le sens, l’humour et l’acuité du paysage…. L’attaque, le mépris et la destruction des langues… représentent un symbole, une importante métaphore. La décapitation. L’image de la décapitation est sans doute trop précise, trop directe, pour rendre compte des actions menées contre les langues dominées. Il s’agissait plus de thérapie par électrochocs… d’une dislocation de la pensée plus que de l’amputation des moyens de penser. La perte des mots qui dit l’histoire, la connaissance et l’héritage combine d’une manière dévastatrice toutes les autres dépossessions.

L’UNESCO propose ainsi d’agir dans 5 domaines :

Proposer aux professeurs de langues une formation sur les bases de la linguistique, les techniques et méthodes d’enseignement des langues, la planification de programmes d’études et la préparation de matériels didactiques.

Former des linguistes locaux et des membres des communautés à établir des règles d’orthographe, mais aussi à lire, écrire, analyser leur langue et produire des outils pédagogiques. La création de centres de recherche où l’on enseignera aux locuteurs de langues en danger à étudier, documenter et archiver leur propre matériel linguistique est une bonne mesure. L’alphabétisation est utile à l’enseignement et à l’apprentissage de ces langues.

La politique linguistique nationale doit favoriser la diversité des langues, y compris les plus menacées. Les sociologues et les spécialistes en sciences humaines, tout comme les locuteurs de langues en danger devraient être plus nombreux à participer activement à la formulation de politiques linguistiques nationales.

(…) De nombreuses études démontrent que l’acquisition du bilinguisme n’altère en rien la maîtrise de la langue officielle.

Document de travail du Comité d’experts pour une politique des langues d’oïl (CEPPLO) à l’intention des Conseils régionaux concernés

> 12 constats et 12 propositions (2019)

Langues d'oïl en France et au-delà

Le domaine linguistique d’oïl est la partie des territoires français, belge et luxembourgeois où l’on parle des langues d’origine romane autres que le français officiel, l’occitan, le catalan et le corse. « Oïl » et « oc » étaient les mots qui, au Moyen Âge, signifiaient « oui » respectivement dans la zone ci-dessus décrite et dans le pays occitan. Ils demeurent, aujourd’hui, une façon commode de désigner ces deux domaines linguistiques.

Les acquis depuis 25 ans et les reculs…

1982
Création d’épreuves facultatives de gallo, normand, picard, poitevin-saintongeais pour les concours d’entrée aux Ecoles Normales. Maintien de ces épreuves pour les concours d’entrée aux IUFM.
1984
Création d’une épreuve facultative de gallo au baccalauréat et organisation d’un enseignement de gallo.
1985
Nomination de Michel Gautier, président de Défense et Promotion des Langues d’Oïl, (DPLO) au conseil national des langues et des cultures régionales institué par le décret du 23 septembre 1985
1986
Première réunion du Conseil national des langues et des cultures régionales qui vote deux avis favorables aux langues d’oïl : émissions hebdomadaires de radio et de télévision, extension de l’épreuve facultative au baccalauréat à l’ensemble des langues d’oïl. Ces avis ne seront pas suivis d’effet.
1991
Suite à une large concertation, le député Yves Dollo fait figurer dans l’article premier de sa proposition de loi sur les langues régionales de France « les langues du domaine d’oïl ».
1992
Les langues du domaine d’oïl sont admises par le Comité français du Bureau Européen pour les langues moins répandues (organisation non gouvernementale agréée par l’Union Européenne).
1995
L’anthologie Paroles d’Oïl bénéficie d’une aide de la Commission Européenne.
1997
L’association D.P.L.O. et la communauté française de Belgique organisent près de Charleroi un colloque intitulé « Ecrire les Langues d’oïl » avec la participation d’une centaine de spécialistes universitaires et associatifs.
1997-2006
Des enseignements concernant les langues d’oïl sont dispensés dans cinq universités françaises : Amiens (picard), Caen et Rouen (normand), Rennes (gallo), Poitiers (poitevin-saintongeais), trois universités belges : Bruxelles, Liège, Louvain (wallon), trois universités du Canada : Québec, Chicoutimi, Moncton (« français du Canada et langues d’oïl occidental »).
1999
Les langues d’oïl figurent dans la liste des « langues parlées par des ressortissants français sur le territoire de la République » dans le rapport établi par Bernard Cerquiglini, directeur de la Délégation à la langue française et aux langues de France, et demandé par le Ministère de la Culture et de l’Education.
2002
Suppression des langues d’oïl dans la liste des langues régionales qui peuvent donner lieu à un enseignement facultatif au sein des I.U.F.M. et à une épreuve optionnelle au concours de recrutement des professeurs des écoles. Fermeture en 2002 d’une option à l’Université de Rennes 2 pour cause d’un nombre insuffisant d’étudiants tandis que certains cours de langues « rares » ne sont suivis que par quelques étudiants. Refus de réouverture en 2004 par la présidence.
2003
Lors du colloque « Les langues romanes minoritaires en Europe » à Lamballe (Bretagne), plusieurs universitaires travaillant sur les langues d’oïl et représentants de ces langues ont montré la vitalité surprenante de ces langues au regard d’autres langues régionales en France mais aussi les difficultés identitaires et sociales liées à leurs pratiques.
Diapositive précédente
Diapositive suivante

Principales revendications de D.P.L.O :

1 Le rétablissement de l’enseignement des langues d’oïl dans les IUFM (disparues en 2002 de la liste des langues régionales qui peuvent donner lieu à un enseignement facultatif) dispensé par des enseignants formés et agréés par l’Education Nationale, et de l’épreuve au concours de recrutement des professeurs des écoles.

2 – L’organisation d’un enseignement facultatif de la maternelle à l’université.

3 – L’ouverture d’épreuves facultatives au baccalauréat pour toutes ces langues.

4 – La diffusion d’émissions régulières dans le service public de radio et de télévision.

Ateliers de patois

On évalue à 20 000 locuteurs aujourd’hui les personnes qui parlent le bourguignon.

Et si on prenait contact ?

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